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En Chine, le plus ancien fromage du monde livre ses secrets

L’histoire du fromage vient sans doute de faire un grand bond en avant. Une équipe chinoise est parvenue à extraire l’ADN des plus anciens résidus de produits lactés jamais découverts. Ces échantillons solides de quelques centimètres de large, exhumés d’une tombe vieille de quelque 3 500 ans, dans un cimetière du Xinjiang, livrent des informations essentielles, tant sur la propagation de cette pratique alimentaire que sur l’évolution de la composition des grains de kéfir, ici employés pour la fermentation. Publiés dans la revue Cell, le 25 septembre, ces résultats promettent d’être largement commentés tant parmi les paléontologues que chez les spécialistes de l’alimentation.
Situé à l’est du désert de Takla-Makan, dans la région autonome ouïghoure, le cimetière de Xiaohe est un site d’exception. Découvert au début du XXᵉ siècle, il a pris son envol scientifique au début du XXIᵉ siècle, quand les archéologues chinois ont mis au jour quelque trois cents sépultures de l’âge du bronze, vieilles de 3 300 à 3 600 ans, dont 167 ont été fouillées. Dans la plupart d’entre elles, les chercheurs ont retrouvé des corps momifiés, mais aussi des milliers d’objets, d’extraits de plantes et ce qui ressemblait à de fragiles cailloux. Placés autour du cou des défunts, telles les pierres d’un collier, ou le long du corps, ils piquaient la curiosité de tous les scientifiques.
En 2014, une première équipe chinoise parvient à faire parler les protéines : il s’agit de produits lactés. Et pas n’importe lesquels : la présence conjointe de bactéries et de levures déjà connues offre la signature du kéfir, ce mode de fermentation utilisé depuis des millénaires pour préparer entre autres des boissons lactées ou à base de fruits.
Mais les protéines n’offrent que des informations parcellaires. Pour pouvoir vraiment lire dans les résidus de fromage, il faut de l’ADN. Extraire ce code génétique d’échantillons aussi anciens, contaminés depuis des milliers d’années par d’autres micro-organismes, apparaît alors impossible. C’est pourtant ce qu’a réussi Qiaomei Fu, responsable du laboratoire d’ADN ancien à l’Institut de paléontologie des vertébrés et de paléoanthropologie de l’Académie des sciences chinoises, et son équipe.
« Un véritable exploit technologique », salue le biophysicien Christophe Lavelle, chercheur au Muséum national d’histoire naturelle, à Paris, dont le laboratoire poursuit un projet sur le kéfir et son histoire. Ce dernier impose de développer des outils particuliers, sortes de sondes spécialisées capables d’aller dénicher dans la meule de foin de ces agrégats lactiques largement altérés le code génétique de minuscules aiguilles – bactéries, archées, levures…
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